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Les contacts humains sont plus essentiels que jamais

Le bip de votre réveil électronique enfoui sous l’oreiller vous rappelle qu’il est l’heure de vous lever. Dans l’obscurité la plus totale, vous circulez dans la maison sur la pointe des pieds, sautez sous la douche et vous habillez en vitesse avant de vous laisser happer par le temps glacial de ce matin d’hiver. D’ailleurs, est-ce bien le matin ou le milieu de la nuit ? Quoiqu’il en soit, vous devez vous rendre à l’aéroport pour attraper le premier vol.

Cette scène est familière à tous les voyageurs d’affaires, ces « guerriers de la route » d’avant la pandémie. La revivront-ils un jour?

Au début de la pandémie, les aéroports et les compagnies aériennes ont enregistré une chute sans précédent du nombre de voyageurs, soit une diminution de 90 % du trafic de passagers par rapport à la même période de l’année précédente. Si de nombreux secteurs ont été touchés par la pandémie, peu l’ont été aussi durement que le transport aérien. La véritable question consiste à savoir à quoi ressemblera la reprise, si reprise il y a.

La pandémie a révélé à bien des gens que les outils tels Zoom et Teams peuvent être extraordinairement efficaces. Ils permettent, par exemple, à des gens travaillant dans plusieurs régions différentes du monde de communiquer de façon plus fluide et plus humaine que les traditionnels appels-conférences. Il n’est donc pas étonnant qu’on ait assisté à une accélération fulgurante de leur utilisation, autant dans des contextes familiaux que pour l’enseignement et les affaires. Il s’agit de savoir si ce changement s’installera en permanence, avec un effet évidemment très néfaste sur l’industrie du voyage. Il semble que non.

Avant l’arrivée récente du variant Omicron, les voyages aux États-Unis connaissaient un rebond vigoureux, en particulier dans le secteur du séjour d’agrément. United Airlines a annoncé l’achat de 270 nouveaux avions avant 2026. Il s’agit de la plus importante acquisition d’avions depuis plus de dix ans. « Les voyages d’agrément en avion ont complètement repris », a annoncé le PDG de la United Airlines, Scott Kirby. La demande, longtemps contenue, et la hausse du revenu disponible des ménages contribuent à cette reprise rapide.

Perspectives a rencontré un important investisseur canadien œuvrant dans ce créneau. Ce dernier observe également une croissance et se nourrit d’espoirs. Son optimisme s’appuie sur l’idée que « l’être humain désirera toujours explorer le monde ». Il compte également sur la croissance de la classe moyenne à l’échelle mondiale. Certains indicateurs clés confirment son point de vue : déjà, le nombre de voyageurs et de vols aux États-Unis a crû de plus de 75% durant l’automne 2021 par rapport à la même période en 2020.

Mais qu’en est-il des voyages d’affaires ? Ce créneau est vital pour la plupart des compagnies aériennes. D’ailleurs, l’on dit souvent que la rentabilité du transport aérien se joue surtout « à l’avant de l’avion », c’est-à-dire dans la classe affaires.

Si certains estiment que la technologie, les nouvelles plateformes de vidéoconférence et les réunions virtuelles finiront par remplacer une bonne partie des voyages d’affaires, la plupart des observateurs et des investisseurs de l’industrie prévoient le contraire. Les voyageurs d’affaires sont en pause forcée, mais la demande reste énorme. À preuve, les voyages en avion d’affaires et privés ont augmenté d’environ 20 % par rapport à la période prépandémique.

Le besoin de renouer avec des partenaires commerciaux, des clients et d’établir de nouveaux contacts demeure impérieux. Un cadre rencontré par Perspectives, et qui se décrit lui-même comme un vieux routier des voyages d’affaires, affirme que les conférences virtuelles ne sont pas aussi efficaces pour établir des contacts avec de nouveaux clients ou fournisseurs. « Avec Zoom, il m’est impossible d’établir autant de contacts qu’auparavant, lorsque j’étais sur place à un congrès professionnel par exemple ». La nécessité d’établir des relations d’affaires, qui constituent le fondement même de l’activité commerciale, amènera les gens d’affaires à se déplacer à nouveau.

Donc, tout indique que le secteur du transport aérien va rebondir. Reste à voir à quel rythme, à quel niveau et à quel moment. Si la plupart des analystes et des observateurs s’accordent à dire que les réunions virtuelles remplaceront les conférences téléphoniques ainsi que certains déplacements pour affaires, ils estiment aussi que la majorité des gens renoueront avec leurs anciennes habitudes.

L’on s’attend à une augmentation des réunions combinant le virtuel et le présentiel, où la grande majorité des participants seront présents en personne. Car pour les « guerriers de la route » comme moi, les voyages pour assister à des conférences, à des rencontres stratégiques ou à des rendez-vous de l’industrie reviendront vite à l’agenda.

Je me prépare déjà à l’idée d’être arraché à mon sommeil à 5 heures du matin.

La pandémie a ouvert la porte au programme national de garderies inspiré du modèle québécois

Pendant la dernière campagne électorale, le gouvernement Trudeau a clairement affiché son intention d’instaurer un service de garde d’enfants à 10 dollars par jour. Cette promesse n’est pas née du hasard. Les sondeurs du Parti libéral du Canada ont certainement perçu les mêmes choses que l’équipe de recherche de Navigator.

Au lendemain des élections de 2021, nous avons rencontré plusieurs Canadiens pour comprendre pourquoi ils avaient voté pour les libéraux. Nous avons été frappés de constater que la pandémie de COVID-19, combinée aux augmentations de plus en plus répandues des prix des biens et des services, a aiguisé les inquiétudes des Canadiens au sujet des inégalités sociales et des obstacles financiers pour l’accès aux services essentiels, telle la garde d’enfants.

De plus, l’aide versée par le gouvernement fédéral pour compenser les effets dommageables de la pandémie a été tellement appréciée qu’elle a changé l’opinion des Canadiens au sujet de l’action des gouvernements. Désormais, les Canadiens veulent un état actif, qui intervient pour combattre les inégalités sociales.

C’est dans ce contexte que le gouvernement Trudeau a décidé de lancer un nouveau programme national de garde d’enfants à prix modique. Il est intéressant de se rappeler le chemin parcouru par le Québec, le précurseur de ce nouveau projet pancanadien.

En 1997, sous l’influence de Pauline Marois, alors ministre de l’Éducation, le gouvernement de Lucien Bouchard lançait les garderies à 5 dollars. À l’époque, le débat autour des garderies subventionnées était des plus politisés. Certains allaient jusqu’à dire que le gouvernement péquiste voulait endoctriner les enfants dès le berceau… mais près de 25 ans plus tard, force est de constater que c’est Mme Marois qui avait vu juste.

Ce grand projet a eu un impact important sur le milieu du travail, plus précisément sur la carrière de milliers de femmes. En 2008, dix ans après la mise en place du programme des services de garde subventionnés, une étude réalisée par la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke révélait que le programme avait incité plus de 70 000 mères à occuper un emploi, ce qui s’est traduit par une hausse du taux d’emploi global au Québec de 1,78 %, et une hausse du PIB de 5,1 milliards de dollars (« Les garderies à 7 dollars sont rentables, selon une étude », 2012). Près de vingt ans plus tard, soit en 2016, cette progression était encore plus marquée et 232 000 enfants fréquentaient les services de garde. La proportion de femmes âgées entre 20 et 44 ans ayant intégré le marché du travail était passée de 76% à 85 %, alors que cette proportion est restée à peu près la même, de 78 % à 80 %, dans les autres provinces canadiennes durant la même période (« Les CPE ont permis de faire reculer la pauvreté au Québec », 2017).

Depuis l’existence du programme dans la Belle Province, on remarque que le nombre de familles monoparentales recevant de l’aide sociale a chuté de 64 %. Plus encore, entre 1998 et 2014, le taux de pauvreté estpasséde38%à23% («Les CPE ont permis de faire reculer la pauvreté au Québec », 2017). Naturellement, il se trouvera toujours des détracteurs pour juger que la société québécoise paye beaucoup trop cher pour ce programme et que, ultimement, celui-ci devrait être revu en profondeur, sinon carrément aboli. Je répondrai à ceux-ci en m’appuyant sur l’opinion du distingué professeur américain James Heckman. Selon ce récipiendaire du Prix Nobel en économie, peu de politiques sociales offrent un meilleur rendement sur investissement. Toujours selon le professeur, les bénéfices du programme de CPE sont encore plus évidents lorsqu’il est question d’enfants issus de milieux défavorisés et que les services de garde offerts sont de qualité (« Analyse : les garderies à la rescousse de l’économie canadienne », 2021). Les propos du professeur Heckman sont corroborés par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui considère que l’accès à des services de garde abordables se veut l’un des meilleurs moyens pour inciter les femmes à rejoindre le marché du travail. En fait, l’OCDE souligne qu’avant la mise en place des Centres de la petite enfance, le taux de participation des femmes au marché du travail accusait un retard de 2,7 points de pourcentage sur la moyenne canadienne, alors qu’en 2019, il la surpassait de 3,3 points. (« Analyse : les garderies à la rescousse de l’économie canadienne », 2021).

Il apparaît souhaitable que les concitoyens canadiens se dotent d’un service de garde de qualité comparable à celui instauré au Québec, mais cela devra se faire sans ingérence dans la gestion des CPE québécois et en offrant à la province la compensation financière qui lui revient.

Le projet mis en œuvre par le gouvernement Trudeau sera l’un des plus importants programmes sociaux à voir le jour au Canada depuis les 25 dernières années. Il n’aurait probablement pas vu le jour n’eut été de la pandémie et de son impact sur l’opinion publique canadienne.

Je ne peux m’empêcher de sourire en pensant qu’il sera calqué sur celui de Mme Marois, une souverainiste de la première heure. C’est pour dire… On est fait pour vivre ensemble !

Budget fédéral 2022

Dans son deuxième budget en tant que ministre des Finances, Chrystia Freeland a proposé un plan économique beaucoup plus prudent pour le Canada que ce qui avait été prévu, surtout si l’on tient compte de son premier budget en avril 2021, du programme électoral de son parti l’automne dernier et de l’accord de soutien et de confiance du gouvernement Trudeau avec les Néo-Démocrates. ​

Ce budget marque le début de la fin des soutiens en cas de pandémie. Le rythme du retrait est mesuré comme il se doit, mais l’objectif est clair : le gouvernement du Canada met fin aux mesures temporaires qu’il avait instaurées à la suite de l’affaire COVID-19.​

Le budget reflète l’accord récent avec le NPD, en ce sens qu’il signale des progrès sur les priorités clés de ce parti, mais l’impact est très concentré sur quelques engagements politiques précis. En fait, l’impact de cet accord est circonscrit par des considérations externes, qui ont clairement exercé plus de pression sur les choix du gouvernement que l’accord de confiance et d’approvisionnement. Nous sommes en effet bien loin du Reconstruire en mieux.​

Pour l’essentiel, le budget fédéral 2022 est façonné par des forces mondiales qui ont limité le champ d’action du gouvernement et concentré son attention sur quelques grandes priorités : le logement, les changements climatiques et la guerre en Europe. Ce n’est pas le budget qui avait été prévu lorsque le premier ministre Trudeau a choisi son conseil des ministres et rédigé leurs lettres de mandat. C’est le budget que le monde et toutes ses incertitudes ont imposé au Canada.​

Vous pouvez également télécharger notre analyse budgétaire ici.

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