Lire la version originale anglaise de ce texte sur le site du National Post
C’est officiel: David Suzuki est allé trop loin. Lors d’une manifestation organisée par le groupe extrémiste qui milite contre les combustibles fossiles, Extinction Rebellion, et ultérieurement lors d’une entrevue accordée à CHEK News, Suzuki a déclaré: «Nous sommes dans la merde… Voilà où nous sommes rendus. La prochaine étape après cela … des pipelines vont exploser si nos dirigeants ne font pas attention à ce qui se passe.»
Suzuki a beau avoir déclaré plus tard au National Post qu’il n’était pas en faveur de l’explosion de pipelines, il ne peut être assez naïf pour croire que son «avertissement» ne pourrait pas avoir de conséquences. C’est comme si le président américain Donald Trump réprimandait une foule en colère en leur disant: «Si vous ne vous battez pas de façon plus convaincante, vous n’aurez tout simplement plus de pays», dans les heures précédant l’assaut de la foule contre le Capitole. «Je n’incite personne à la violence! J’exprime seulement une opinion! Circulez, rien à voir ici.»
Sauf qu’il ne s’agit pas seulement d’exprimer une opinion. Comme l’a souligné à juste titre le ministre de l’Environnement de l’Alberta, Jason Nixon, «David Suzuki est tellement déconnecté de la réalité qu’il prône l’éco-terrorisme … envers les Canadiens et les industries – c’est complètement inacceptable et extrêmement imprudent.» Le premier ministre Jason Kenney, sans doute reconnaissant d’avoir l’attention détournée de ses problèmes actuels, a tweeté: «Cette incitation à la violence de David Suzuki est dangereuse et devrait être condamnée par tout le monde. Au Canada, nous résolvons nos différends de manière pacifique et démocratique, et non par des menaces de terrorisme ou des actes de violence.»
Même la Fondation David Suzuki a désavoué ces propos, publiant un fil Twitter dans lequel elle affirmait que Suzuki parlait en son propre nom (malgré le fait qu’il portait une veste de la Fondation lors de l’incident). La Fondation a ajouté que les commentaires de Suzuki étaient une «réflexion sur la frustration accrue» des Britanno-Colombiens en réponse aux dômes de chaleur, aux incendies de forêt et aux rivières atmosphériques qui ont affligé leur province «alors que le gouvernement de la Colombie-Britannique continue de développer les infrastructures des combustibles fossiles, y compris les usines de GNL et les pipelines.»
Bien que la situation en Colombie-Britannique soit épouvantable et des plus déchirantes, des actes d’éco-terrorisme ne l’amélioreront pas. Ce terme, «éco-terrorisme», a été inventé en 1983 par l’écrivain Ron Arnold en référence à «un crime commis pour sauver la nature». Il faisait référence à des actes commis par des personnalités comme le Unabomber, Ted Kaczynski, qui a tué trois personnes et blessé deux douzaines d’autres au nom de l’anti-industrialisation. L’éco-terrorisme a récemment fait la une des journaux à propos de la nouvelle directrice du Bureau of Land Management du président Joe Biden, Tracy Stone-Manning, qui, en tant qu’étudiante, était impliquée dans un groupe extrémiste appelé Earth First et avait écrit une lettre au US Forest Service en 1989 dans laquelle elle prévenait: «PS: Si vous entrez quand même, mes salaud, beaucoup de personnes pourraient être blessées.»
Pour ceux d’entre nous qui avons grandi avec The Nature of Things et qui se soucient à la fois de l’environnement et de l’économie, il est bien triste de voir une icône comme Suzuki aller dans cette direction. Il est déjà assez difficile de le prendre au sérieux depuis que le Toronto Sun a rapporté qu’un homme qui appelle les autres à limiter leur empreinte carbone possède quatre maisons, dont un manoir à Vancouver et une résidence en copropriété avec une entreprise de combustibles fossiles. Suzuki a également cinq enfants, ce que l’organisme Extinction Rebellion désapprouverait sans aucun doute, ayant inspiré le mouvement Birthstrike des femmes qui refusent de se reproduire pour ne pas exacerber les changements climatiques…
La réalité est que tant que nous n’aurons pas trouvé un substitut fiable et évolutif aux combustibles fossiles, faire exploser des pipelines n’apportera rien. Des alternatives se profilent à l’horizon: l’électrification sera utile, mais a ses propres impacts environnementaux en raison de la production et de l’élimination des batteries. L’hydrogène est un concurrent possible, mais la technologie est à des années encore d’un déploiement de masse. En attendant, les sociétés énergétiques travaillent avec diligence sur la capture du carbone et l’extraction responsable afin de minimiser l’impact de l’utilisation des combustibles fossiles.
Au lieu d’avertir d’actes de violence si «nos dirigeants ne font pas attention à ce qui se passe», Suzuki devrait soutenir les efforts des secteurs public et privé pour résoudre le problème. Le malheur, la morosité et l’éco-terrorisme ne sauveront pas la planète, mais l’ingéniosité, la technologie et l’optimisme pourraient bien le faire.