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Budget fédéral 2021

Il semblerait que le gouvernement Trudeau ait pris à cœur le conseil de Sir Winston Churchill. Au-delà de la réponse à la pandémie, le budget 2021 pourrait modifier fondamentalement le rôle du gouvernement fédéral et transformer sa relation avec les Canadiens.

En supposant que toutes les initiatives annoncées aujourd’hui soient mises en œuvre, ce budget multipliera les points de contact d’Ottawa avec les citoyens : engagement sans précédent du gouvernement fédéral en matière de politiques sociales dans les domaines de l’éducation de la petite enfance et des soins de longue durée, soutien direct aux PME et réaction politique aux répercussions inéquitables de la pandémie sur les femmes, les Autochtones et les Canadiens racialisés.

La conciliation de ce budget avec la réalité fédérale au Canada constituera un défi énorme. Plus que les réactions des partis d’opposition, ce sont les négociations avec les provinces qui détermineront le caractère ambitieux des mesures annoncées aujourd’hui et, finalement, l’atteinte de l’objectif du gouvernement de rebâtir en mieux.

Si vous souhaitez recevoir des conseils dans le contexte des élections fédérales à venir, n’hésitez pas àcommuniquer avec le bureau de Navigator à Ottawa à info@navltd.com.

Le Budget 2021-2022 du Québec

Ouvrir les vannes… avec une certaine prudence

Le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, a déposé jeudi après-midi son budget 2021-2022. Ce budget reporte de deux ans le retour à l’équilibre budgétaire – celui-ci est désormais prévu pour 2027-2028. Plutôt que de s’attaquer à court terme à la réduction du déficit, le gouvernement de la Coalition Avenir Québec choisit d’investir 15 milliards de sommes additionnelles pour les cinq (5) priorités qu’il a identifiées :

  • renforcer notre système de santé;
  • appuyer la réussite scolaire et les jeunes;
  • accélérer la croissance et la transition vers la nouvelle économie;
  • soutenir les Québécois;
  • assurer l’équité.

Aux yeux de M. Girard, la priorité doit aller à la consolidation de la reprise post-pandémie «avant de mettre en place un plan de retour à l’équilibre budgétaire». Les mesures de réduction des dépenses et/ou d’augmentation des revenus attendront donc le retour du «plein emploi». À noter que le retour au déficit zéro en 2027-2028 dépend notamment d’une hausse substantielle des transferts fédéraux versés aux provinces au titre de la santé. De plus, le gouvernement réitère son engagement «de ne pas alourdir le fardeau fiscal.»

Ce budget comprend de nouvelles mesures totalisant $2,2 milliards pour accroître la productivité et stimuler l’investissement des entreprises. Entre autres, M. Girard annonce une baisse du taux d’imposition des PME québécoises (de 4% à 3,2%) sur les premiers $500 000 de revenu imposable.

Dans le domaine de la santé, outre les $11,9 milliards prévus pour vaincre la pandémie, le gouvernement annonce 2 milliards sur six années pour améliorer les services aux aînés (ajout de 500 places d’hébergement de longue durée) et 1,3 milliards pour rehausser les soins et services en santé (527 millions pour améliorer les soins de première ligne).

En éducation, des montants substantiels ($1,2 milliard) sont annoncés pour soutenir la réussite scolaire et favoriser la persévérance au niveau collégial et universitaire. Il s’agit notamment de contrer les effets néfastes, déjà constatés, de la pandémie sur l’apprentissage des jeunes.

Quelques mesures sont prévues pour faciliter la conciliation travail-famille, notamment 97 millions pour créer 3600 nouvelles places dans les services de garde en milieu familial.

Un montant ($214 millions) est annoncé pour prolonger le soutien au secteur culturel, durement touché par les mesures prises pour lutter contre la COVID-19. Le secteur du tourisme reçoit pour sa part $205 millions.

Le gouvernement du Québec avait déjà réservé plus de 130 milliards à son plan d’infrastructures de dix ans (2021-2031). Le ministre Girard ajoute 4,5 milliards à cette somme déjà colossale. Ainsi, en moyenne annuelle, Québec investira 13,5 milliards dans la construction et la restauration des routes, immeubles et transports publics.

Au total, y compris les mesures de lutte à la pandémie, les dépenses du gouvernement du Québec auront augmenté de 4,3% par année en moyenne entre 2020-2021 et 2022-2023. Dans le contexte actuel, on ne peut pas dire que c’est déraisonnable.

Navigator lance le Centre canadien pour la mission de l’entreprise

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Navigator est fier d’annoncer la création du Centre canadien pour la mission de l’entreprise.

Cette initiative novatrice permettra de fournir aux entreprises et aux organisations canadiennes les informations, les outils et l’appui nécessaires pour redéfinir et renforcer à la fois la portée de leur mission et les contributions qu’elles apportent plus largement à la société.

Navigator développe cette initiative depuis un certain temps déjà et, bien qu’elle ne soit pas une réponse à la crise de COVID-19, son lancement ne pourrait pas être plus opportun.

Le centre sera dirigé par Brian Gallant, conseiller spécial chez Navigator et ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick, aux côtés d’une équipe d’experts en politique, gouvernance, affaires, communications, droit et responsabilité sociale.

S’appuyant sur les résultats d’une étude inédite et exclusive qui sera rendue publique cet été, le Centre publiera régulièrement des analyses et des conseils à l’intention des entreprises, basés sur les attentes des Canadiens. Ces informations serviront à concevoir des solutions stratégiques sur mesure permettant aux entreprises et aux organisations de définir, de faire progresser et de mettre en œuvre leur raison d’être.

M. Gallant annoncera la composition de la nouvelle équipe du Centre dans les semaines à venir. Le premier rapport de recherche du Centre sera publié cet été.

Un portrait du premier ministre du Québec, François Legault, par notre collègue André Pratte

Cet article a été initialement publié dans La Presse le 24 juin 2020.

LE PREMIER MINISTRE PRESSÉ 

Quitte à casser quelques œufs, François Legault ne se laissera pas engourdir par la bureaucratie

Le premier ministre François Legault en a encore surpris plusieurs, lundi, en remaniant son cabinet, alors qu’on s’attendait à ce qu’il ne se livre à ce jeu de chaises musicales qu’à l’automne. Mais M. Legault a vu qu’il y avait un problème à la Santé, que Danielle McCann, femme du réseau, n’arrivait pas à faire bouger le mastodonte. Alors le premier ministre, homme de décision, politicien impatient, n’a pas attendu pour brasser les cartes. Et il a mis à la tête du vaste ministère de la Santé un comptable comme lui, Christian Dubé, qui partage sa vision de la chose publique.

Ce trait de caractère de François Legault, on l’avait vu émerger dès son arrivée en politique. Il voulait moderniser le Parti québécois et, Lucien Bouchard parti, en devenir chef. Il s’est vite doté d’une redoutable organisation de jeunes idéalistes pour atteindre ses objectifs.

Ministre de l’Éducation puis de la Santé, il a fixé à la myriade d’organismes relevant de lui des « contrats de performance », des « plans de réussite » et des « bulletins ». Les bureaucrates devraient désormais rendre des comptes !

La souveraineté ne progressait pas dans l’opinion ; M. Legault a pondu un « budget de l’an 1 », censé convaincre par sa rigueur les Québécois réticents. Ça n’a pas marché. Alors, exit la souveraineté, passons à autre chose !

Depuis que M. Legault est premier ministre, les choses vont aussi rondement. La ministre de l’Environnement, MarieChantal Chassé, était paralysée par les micros ? Pas de temps à perdre, elle est renvoyée sur la banquette arrière, moins de trois mois après la formation du conseil des ministres.

L’environnement est à la tête des préoccupations des Québécois ? La CAQ, jusqu’ici indifférente, dépose en mars dernier un budget promettant 6,7 milliards d’investissements sous le thème « Bâtir une économie verte ».

LE QUÉBEC « SUR PAUSE »

Arrive la COVID-19. Mis au courant de la situation, le premier ministre met le Québec entier « sur pause ». Du jamais vu ! L’histoire dira si toutes les conséquences de cette mesure extrême avaient été mesurées. Chose certaine, il fallait agir, et François Legault ne déteste rien plus que la tergiversation. La décision a été prise, la population a suivi, presque avec enthousiasme.

Il manque des travailleurs dans les CHSLD ? On fait appel à l’armée, malgré le caractère un peu « gênant » de la chose pour un ex-souverainiste. Surtout, on augmente les salaires des préposés et on met sur pied d’urgence un programme de formation rapide pour les personnes intéressées. Celles-ci affluent, dont probablement un bon nombre venant des résidences privées. Un effet pervers sous-estimé ? C’est le risque des décisions rapides, pour ne pas dire précipitées.

À la Santé, Christian Dubé va s’attaquer « au plus grand défi de gestion au Québec », de dire le premier ministre. Il va avoir comme priorité de « donner de meilleurs services aux Québécois, et de donner des services de façon plus efficace. Les comptables agréés s’intéressent à l’efficacité ». Entre comptables…

La province est plongée dans une récession d’une gravité historique ? Le gouvernement multiplie les mesures, et il faut que ça aille vite, Legault oblige. Alors on dépose à la dernière minute le projet de loi 61, pour que les projets d’infrastructures soient mis en marche dès cet été. « Les Québécois sont capables de faire un CHSLD en deux ans. Il n’y a pas de raison que ça prenne quatre ans », lance le premier ministre. Devant l’envergure de la résistance, force est de constater que cette fois-ci encore, le cabinet n’avait pas attaché tous les fils avant de foncer. Cependant, l’ouverture aux amendements était manifeste. Comme quoi, apôtres de l’efficacité, les comptables sont aussi des gens éminemment pragmatiques.

Les Québécois, eux, sont visiblement satisfaits de l’ensemble de l’œuvre. Ils ont vu trop de politiciens paralysés par le mastodonte bureaucratique, champion toutes catégories dans la discipline de l’inertie. Combien de visions politiques se sont échouées aux pieds du complexe G ? Quitte à casser quelques œufs, quelques egos aussi, François Legault, lui, ne se laissera pas engourdir. Pour le meilleur et malgré certains inconvénients, le Québec est dirigé par un premier ministre pressé.

Il devient de plus en plus épineux pour Justin Trudeau de marcher sur la corde raide de Donald Trump

M. Trump verra assurément dans l’engagement de M. Trudeau d’augmenter les dépenses dans la défense un argument tactique non seulement à l’égard des négociations de l’ALÉNA à venir, mais également à celui des négociations futures avec son gouvernement.

Cet article est d’abord paru dans le Toronto Star le 11 juin 2017.

La semaine dernière, le ministre de la Défense Harkit Sajjan a annoncé l’engagement du gouvernement Libéral à augmenter de plus de 70 pour cent le budget affecté à la défense d’ici 10 ans, soit un bond annuel de 18,9 à 37,2 milliards de dollars.

La ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a indiqué que cette augmentation découlait de la volonté du Canada de jouer un rôle de chef de file mondial — alors que les États-Unis effectuent un repli.

Alors que les États-Unis reculent devant leurs engagements à tire de chef de file mondial, madame Freeland argue que le Canada doit se lever, faire sa part et élaborer son propre plan d’action.

Les États-Unis semblent être de plus en plus à la traîne sur le plan international et se ranger du mauvais côté de l’histoire.

La plus grande économie mondiale menace de se retirer de l’Organisation mondiale du commerce. Le président des États-Unis refuse de s’engager à respecter le principe fondamental de l’OTAN. Le pays s’est officiellement retiré de l’Accord de Paris sur les changements climatiques et du Partenariat transpacifique. Et l’amitié virile de Donald Trump avec les autocrates de la planète place de plus en plus les États-Unis en marge des organisations multilatérales internationales.

Dans son allocution à la Chambre des Communes mardi, madame Freeland a évoqué l’augmentation des sommes affectées à la défense lorsqu’elle a affirmé que « se fier uniquement au bouclier protecteur des États-Unis ferait de nous un État client » et « une telle dépendance ne serait pas dans l’intérêt du Canada ».

L’allocution de madame Freeland et l’annonce de monsieur Sajjan sont une admission du fait que les États-Unis ne sont plus un allié prévisible et fiable, qu’ils adoptent une direction fondamentalement différente de celle du Canada et des autres pays développés et que le moment est venu pour le Canada de défendre ses positions.

Madame Freeman est claire : le moment est venu pour le Canada d’être un leader.

En bref, c’est le discours auquel le gouvernement souhaite que les Canadiens s’accrochent. Et force est de reconnaître que le message commence à faire son effet.

Mais il pourrait y avoir autre chose en jeu.

Depuis la campagne présidentielle, le président Trump remet vigoureusement en question l’article 5 de l’OTAN. Il a qualifié ce dernier de désuet, argue que 23 des 28 nations membres n’affectent pas suffisamment d’argent à la défense et laisse entendre que même si elles commençaient à y mettre deux pour cent de leur PIB, cela ne suffirait pas.

L’an dernier, la contribution du Canada atteignait 1,19 pour cent de son PIB. L’annonce de la semaine dernière portera le budget affecté à la défense à 1,4 pour cent, soit une augmentation substantielle.

Les hauts représentants de la Maison Blanche ont rapidement accueilli favorablement l’annonce du Canada. Le secrétaire d’État américain à la Défense James Mattis s’est dit « rassuré par les nouvelles concernant la politique du Canada en matière de défense » et un porte-parole de la Maison Blanche a publié sur son compte Twitter que l’augmentation des dépenses du Canada en matière de défense indiquait que les efforts de monsieur Trump commençaient à porter leurs fruits.

M. Trump, qui ne se lasse pas de nous rappeler qu’il est un négociateur hors pair, verra assurément dans l’engagement de M. Trudeau d’augmenter les dépenses dans la défense un argument tactique non seulement à l’égard des négociations de l’ALÉNA à venir, mais également à l’égard des négociations futures avec son gouvernement.

Dans un éclair de génie stratégique, M. Trudeau et ses ministres ont réussi à élaborer un exposé narratif au sujet de l’indépendance et du multilatéralisme du Canada — Le « Modèle canadien » — tout en apaisant M. Trump grâce à un engagement dont l’enjeu est central pour son administration.

Les acteurs politiques savent que les politiques intérieures prévalent sur les politiques étrangères.

Et au pays, M. Trudeau ne demanderait pas mieux que d’être vu comme l’anti-Trump.

Il n’a toutefois pas le loisir de critiquer publiquement le président américain, comme l’ont fait ses homologues Français et Allemand. Les enjeux sont tout simplement trop grands pour le Canada.

Lorsqu’il s’agit des relations États-Unis – Canada, il est plus difficile que jamais pour le premier ministre et son gouvernement d’obtenir l’appui des Canadiens sans se mettre à dos nos voisins du sud.

Ce à quoi nous avons assisté la semaine dernière illustre très bien le défi ce que cela représente. Il est clair que l’exercice d’équilibrisme de M. Trudeau n’est pas appelé à devenir plus aisé dans l’avenir.

Jaime Watt est président exécutif de Navigator Ltd. et stratège conservateur.