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Une note de programmation en provenance du Québec: cette élection ne sera pas une rediffusion

Lire la version originale anglaise de ce texte sur le site du National Post

Dimanche soir, Radio-Canada a diffusé une rencontre de deux heures avec les chefs des partis fédéraux, en français, à la manière d’un comité de rédaction – et a fixé une nouvelle barre en matière de programmation télévisuelle électorale. Contrairement aux débats traditionnels, qui comportent souvent plus de cris que de substance, le format «Meet the Press» a été l’occasion de voir des politiciens se faire bombarder de questions intelligentes, suscitant parfois des réponses honnêtes et même quelques éclats de rires. Et l’émission a braqué les projecteurs sur les priorités électorales du Québec, qui s’annonce comme le champ de bataille clé de la présente campagne.

Ce qui en est ressorti? Premièrement, le français de tout le monde était étonnamment bon, notamment celui du chef conservateur Erin O’Toole. On pouvait presque entendre les soupirs de soulagement des partisans conservateurs lorsqu’Erin O’Toole répondait habilement aux questions, contrairement aux performances moins douces à l’oreille de l’ancien chef, Andrew Scheer, en 2019. Les électeurs francophones peuvent véritablement s’attendre à de la substance lors du premier débat des chefs de langue française jeudi soir, au lieu de se concentrer à tweeter en direct les gaffes linguistiques du chef conservateur.

Deuxièmement, la rencontre mettait en vedette six dirigeants politiques, et non cinq. Le premier ministre du Québec, François Legault, n’était pas là en personne, mais il était l’éléphant dans la salle. Quelques jours auparavant, il avait publié sa liste électorale de «revendications» pour le Québec et avait qualifié les plateformes libérale et néo-démocrate de «beaucoup plus centristes» que celles de leurs rivaux, notamment sur la question de la santé. Alors que les remarques de Legault pourraient stimuler le vote bloquiste, les conservateurs pourraient en fait gagner le plus en ayant l’air d’être une sorte de refuge pour les votes nationalistes mous, en particulier dans les courses serrées avec le Bloc autour de la ville de Québec.

Les commentaires de Legault ont également incité les membres du panel de Radio-Canada à demander au chef du Bloc, Yves-François Blanchet, si son parti est devenu une «façade» pour le parti de Legault, la Coalition Avenir Québec, une accusation que s’est empressé de nier Blanchet. Ils ont également demandé si les ententes provinciales conclues avec Ottawa, comme la part du Québec du 6 milliards de dollars en fonds fédéraux alloués aux garderies, compromettaient l’objectif ultime du Bloc, soit l’indépendance du Québec. «Alors le fédéralisme fonctionne?», a demandé la panéliste Anne-Marie Dussault. Ce à quoi Blanchet a répondu avec humour qu’il y avait une différence entre rapatrier des pouvoirs, petit à petit d’Ottawa, et les avoir tout d’un coup en tant que «vraie nation».

Cela ne suffira peut-être pas à satisfaire les partisans de la ligne dure du Bloc, dont certains se plaignent de l’absence du mot «indépendance» dans la plateforme du parti. Attendez-vous à ce que le chef libéral, Justin Trudeau, talonne Blanchet sur cette question lors des prochains débats. Si Trudeau peut amener Blanchet à adopter une ligne plus dure en matière de souveraineté, cela pourrait ramener les votes nationalistes des conservateurs vers le Bloc, tout en siphonnant les votes fédéralistes des conservateurs vers les libéraux en réaction à un sentiment de nationalisme renouvelé.

Enfin, l’autre grand champ de bataille au Québec sera probablement l’environnement, et on a pu voir O’Toole et Blanchet sur la défensive dimanche soir. Lorsqu’on lui a demandé s’il forcerait un pipeline est-ouest sur la province, O’Toole n’a pas directement abordé la question, s’en remettant au «respect des compétences constitutionnelles» et confirmant seulement qu’il appuierait les projets existants, tels que Trans Mountain.

Pendant ce temps, Blanchet a été interrogé sur son appui à un projet de tunnel de 10 milliards de dollars sous le fleuve Saint-Laurent qui a été fortement critiqué par les écologistes et pour lequel Legault demande à Ottawa de payer 40 % de la facture. Le Parti québécois s’est prononcé contre le projet, provoquant davantage de divisions dans les rangs souverainistes qui menacent de miner le soutien du Bloc. «Je sais que cela peut se faire de façon beaucoup plus écologique, mais la décision ne sera pas prise par moi, mais par le gouvernement du Québec», a répondu Blanchet.

La cheffe du Parti vert, Annamie Paul, et le chef du NPD, Jagmeet Singh, se pencheront également sur ces questions lors des prochains débats, bien que leurs efforts n’augmenteront probablement pas leur nombre de sièges dans la Belle Province, qui s’élèvent respectivement à zéro et un. Lorsque les panélistes lui ont demandé s’il pouvait soutenir un gouvernement minoritaire conservateur potentiel, Singh a répondu qu’il était «dans cette élection pour gagner», provoquant quelques pouffées de rires sardoniques de la part de ses interlocuteurs. Ce fut l’un des moments les plus légers de la soirée, mais qui a souligné à quel point l’étoile du NPD a pali dans la province depuis que Jack Layton l’avait peinte en orange, en 2011 – et à quel point la province sera centrale pour décider qui formera le prochain gouvernement fédéral.